Amélie Élie — surnommée Casque d’Or — était une prostituée parisienne. Elle a été rendue célèbre par la presse en raison de son implication dans un affrontement entre deux bandes de voyous en 1902 et elle a finie par devenir un personnage historique de Paris !
Prostitution
Amélie Élie est née en 1870 à Orléans, puis a rapidement déménagé à Paris avec ses parents. Elle a ainsi grandi dans une petite chambre de l’impasse des Trois-sœurs, près de la rue Popincourt, dans le 11ème arrondissement. Ce quartier était insalubre. On y trouvait essentiellement des ouvriers, des chiffonniers et des marginaux. L’espérance de vie enfants y était sept fois inférieures à celle des beaux quartiers de la capitale. Et une fille sur dix finissait par s’y prostituer.
À quatorze ans, Amélie Élie a perdu sa mère et s’est retrouvée à la rue. Elle a alors été recueillie par une péripatéticienne qui se faisait appeler « Hélène de Courtille » et qui vivait dans le quartier de Belleville, dans le 20ème arrondissement. Cette dernière l’a alors mise sur le trottoir afin qu’elle se prostitue elle aussi. C’est à cette époque qu’Amélie Élie a pris le surnom de Casque d’Or en raison de sa chevelure blonde coiffée de façon à ressembler à un casque.
Triangle amoureux et bagarres entre bandes
Après avoir fui un autre proxénète sous la coupe duquel elle était tombée, Casque d’Or, alors âgée de dix-neuf ans, est tombé amoureuse de Joseph Pleigneur, dit Manda. Ce dernier, âgé de vingt-deux, était le chef d’une bande du quartier de Charonne et il était notamment connu pour ses compétences dans la fabrication d’outils de cambrioleur, comme de fausses clefs ou encore des pinces coupantes.
Amélie Élie a continué de se prostituer et Manda était souvent absent. C’est ainsi qu’en 1902 elle a rencontré un certain Dominique Leca, ancien militaire et chef d’une autre bande située dans le quartier de Popincourt, le quartier où elle avait grandi.
Manda n’a pas accepté que Casque d’Or le quitte et — accompagné de sa bande — il s’en est alors pris à Leca qui a fini par recevoir par un coup de couteau. Manda a été arrêté par la police, mais Leca a refusé de témoigner contre lui et il a été libéré. L’affrontement entre la bande de Charonne et celle de Popincourt s’est donc poursuivi durant plusieurs jours, dans différents quartiers de Paris, à coup de couteau, de hachette et de revolver. Manda a été de nouveau arrêté et envoyé en prison grâce au témoignage des parents de Leca.
Entre-temps, toute cette affaire avait attiré l’attention de la presse en plus de celui de la police.
Célébrité
En effet, en ce mois de janvier 1902, l’histoire a fait la une de la presse qui s’est indignée de la présence de ces bandes de voyous au milieu de Paris, de l’insécurité régnant en ville et de l’incapacité des autorités à y mettre fin. Un journaliste du Petit Journal écrivit ainsi : « Ce sont là des mœurs d’Apaches, du Far West, indignes de notre civilisation. Pendant une demi-heure, en plein Paris, en plein après-midi, deux bandes rivales se sont battues pour une fille des fortifs, une blonde au haut chignon, coiffée à la chien ! ».
Au-delà de l’indignation, le public s’est piqué d’intérêt pour Casque d’Or, la prostituée qui a suscité les passions et pour qui des dizaines d’hommes se sont battues dans la capitale. Amélie Élie a alors été sollicitée afin de poser pour des photographes et des peintres. Des cartes postales et des tableaux ont été faits à son effigie et des chansons ont été écrites pour narrer ses aventures. Elle a même engagé pour jouer son propre rôle au théâtre. Cela lui a permis de gagner de l’argent et de vivre confortablement avec Leca pendant un temps.
Mais même si Manda était emprisonné, les affrontements entre sa bande et celle de Leca se sont poursuivis et ce dernier a également été enfermé. En mai 1902, Manda et Leca ont été jugées et condamnées aux travaux forcés au bagne à Cayenne, en Guyane. Leca s’en est évadé en 1916 et n’a pas été retrouvé. Manda a été libéré en 1922, mais n’a pas été autorisé à revenir à Paris.
Personnage historique de Paris
Casque d’Or, quant à elle, s’est vue proposer de publier ses mémoires sous la forme d’un feuilleton dans les colonnes de la revue littéraire Fin de Siècle. Ce qu’elle fit durant l’été 1902. Le préfet de police lui a toutefois interdit de se produire de nouveau sur scène.
En 1917, elle s’est mariée avec un cordonnier dont elle a élevé les quatre neveux. Elle a tenu un commerce de bonneterie pendant un temps et en 1925 elle a repris la gestion de trois maisons closes située dans la rue des Rosiers. Elle est morte de la tuberculose en 1933.
Depuis, son histoire a fait l’objet de livres, de bandes dessinées et même d’un célèbre film de Jacques Becker sorti en 1952 et interprété par Simone Signoret. Un jardin du 20ème arrondissement de Paris porte son nom depuis 1972. Elle est ainsi devenue un personnage historique de Paris !
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Ce personnage historique a été maire de Paris en 1879. Il est le premier métis et le dernier en date à avoir occupé ce poste.
Un metisse issu de la bourgoisie cubaine
Severiano de Heredia est né à Cuba, le 8 novembre 1836, à une époque où l’île était encore une colonie espagnole pratiquant l’esclavage. Inscrit sur les registres de naissance en tant que « mulâtre, né libre », Severiano de Heredia était l’enfant de deux « gens de couleur libres », autrement dit des Noirs ou des Métis, mais non esclaves. Il était également le filleul d’un avocat et propriétaire d’une grande plantation possédant des esclaves. Il a donc grandi dans une famille aisée.
À l’âge de 10 ans, son parrain l’a envoyé à Paris accompagné de sa marraine d’origine française. Et cela, afin de l’éloigner des troubles qui agitaient alors Cuba et qu’il reçoive la meilleure éducation possible. Il a donc fait ses études à Paris dans le lycée Louis-le-Grand, réservé aux élites, et a fini par y recevoir le grand prix d’honneur en 1855.
Passionné de littérature, il a commencé à écrire des nouvelles et des poèmes, puis s’est lancé dans une carrière de journaliste et de critique, en travaillant au sein de journaux comme La Tribune française, politique et littéraire, au sein duquel ont également œuvré Émile Zola et Luc Ferry.
En 1868, il a épousé une Française – Henriette Hanaire – dont il a deux fils. En 1870, il a obtenu la naturalisation française.
Conseiller municipal, député, puis ministre
Parallèlement, il s’est lancé dans une carrière politique. Il a pris position en faveur de l’indépendance cubaine. En 1866, il a rejoint la Franc-maçonnerie en adhérant à « L’Étoile Polaire » du Grand-Orient de France. Il s’est ensuite engagé dans le camp républicain, tendance radicale.
De 1973 à 1881, il a été plusieurs fois élu au conseil municipal de Paris pour le quartier des Ternes, dans le 17eme arrondissement. Et en 1879, il est même devenu président du conseil municipal de Paris. Cela lui vaut aujourd’hui d’être désigné comme le « premier maire noir de Paris ». Toutefois, ce poste était honorifique, limité à un an, et ne permettait pas d’accéder aux mêmes pouvoirs que ceux du maire actuel. Lors de ce passage parmi les élus parisiens, Severiano de Heredia a défendu différentes mesures sociales comme la création de coopératives ouvrières et la mise en place de bibliothèques municipales.
Il a ensuite poursuivi sa carrière à l’Assemblée nationale où il a été élu député en 1881 et 1889. Là, il a pris position en faveur de la laïcisation des hôpitaux et des cimetières, de la légalisation du divorce, des sociétés de secours mutuel ou encore de la limitation de la journée de travail à 10 heures pour les enfants de moins de douze ans.
Enfin, il a été ministre des Travaux publics durant six mois en 1887. À ce titre, il a par exemple travaillé sur les différents projets du futur métro parisien dont la première ligne sera inaugurée en 1900.
Déclin
Par la suite, sa carrière a néanmoins périclité et il a perdu aux élections législatives de 1889 et 1893. L’une des raisons expliquant de son déclin serait à chercher du côté de l’expansion de l’empire colonial français, qui était alors justifié par le devoir de « civiliser » les populations indigènes. Projet colonial qui se manifestait dans Paris par l’organisation de zoos humains mettant en scène des hommes, des femmes et des enfants non européens venant des colonies.
En effet, dans ce contexte, la présence de Severiano de Heredia parmi les élites françaises devenait gênante pour les partisans du projet colonial français, car elle contredisait la nécessité de « civiliser » les Noirs. À cette époque, le racisme s’est développé et Severiano de Heredia a ainsi été surnommé par certains « le ministre chocolat », « le nègre du ministre » ou encore le « nègre roublard aux grosses lippes ».
À noter que malgré cela, Severiano de Heredia ne s’est pas opposé à la colonisation. En tant que député, il a par exemple voté en faveur de la deuxième expédition militaire du Tonkin visant l’expansion coloniale française en Asie du Sud-Est. Du reste, après avoir hérité de la plantation cubaine de son parrain, il a lui-même été propriétaire d’esclave.
Après 1893, il s’est retiré de la vie politique et s’est consacré à l’histoire de la littérature. Il est mort le 9 février 1901 d’une méningite à son domicile de la rue de Courcelles à Paris. Il est enterré au cimetière des Batignolles. En 2013, une voie du 17e arrondissement a été rebaptisée avec le nom de ce personnage historique de Paris.
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En savoir plus : Paul Estrade, Severiano de Heredia. Ce mulâtre cubain que Paris fit « maire » et la République, ministre, Paris, Les Indes Savantes, 2011, 166 p.